« Il faut avoir encore du chaos en soi pour enfanter d’une étoile dansante ». La revigorante affirmation de Friedrich Nietzsche est, par bonheur, souvent citée. Comment ce chaos, qui nous effraie si souvent, peut fertiliser nos vies individuelles et collectives ?
J’ai commencé cette lettre avec ce qui m’était parvenu des dernières nouvelles du monde… toutes particulièrement révoltantes et difficiles à supporter. Quelques jours plus tard, j’ai lu les premières pages d’un magazine qui en énumérait d’autres encore, sans toujours d’ailleurs les reconnaître comme telles - ce qui m’apparut encore pire.
J’aimerais partager avec vous une brève réflexion sur les différents âges de la vie. Que se passe-t-il à chaque nouvelle année ? Passons-nous véritablement d’une identité à une autre à chaque rentrée de septembre comme à chaque anniversaire ?
Nos sociétés ont longtemps méprisé l’animisme - cette manière de considérer que chaque rocher, chaque oiseau, chaque arbre et chaque rivière est doté, disons, d’une âme vivante. Notre modernité a longtemps défini la nature comme un objet qu’il s’agit de dominer. Mais un doute n’aurait-il pas toujours subsisté ?
Devant les nouvelles du monde, il me semble légitime d’éprouver un certain découragement. C’est peut-être sans compter que nous sommes des Jedi. Le problème, autant le préciser tout de suite, est que nous ne le savons pas.
Des quantités inimaginables de femmes, d’hommes et d’enfants contribuent chaque jour à ce qu’on pourrait appeler l’harmonie du vivant. Dans des gestes individuels quotidiens, dans des créations singulières et dans des actions collectives d’ampleur. Dans quelle mesure sommes-nous conscients de cette gigantesque énergie ?
Cette lettre de Mai nous y invite, en rigolant un peu - à tour de rôle sur un ton taquin, sérieux, familier ou carrément dénonciateur, parce que s’attaquer à nos architectures sociales n’est pas une mince affaire.
Les terriennes et terriens que nous sommes ont connu de très longues périodes de paix. Il n’est peut-être pas inutile de préciser que les processus de domination y étaient considérablement moins présents qu’aujourd’hui.
Une fois de plus, je m’interroge sur notre inertie politique. Pourquoi la récurrence des événements climatiques extrêmes ne renforce pas bien davantage la conscience écologique ? Sécheresses, avancée des déserts, inondations gigantesques, terribles incendies, ouragans dévastateurs… nous en faut-il davantage encore ?