Ah, le plaisir ardent de participer au bien commun !

Cette lettre de Mai nous y invite, en rigolant un peu - à tour de rôle sur un ton taquin, sérieux, familier ou carrément dénonciateur, parce que s’attaquer à nos architectures sociales n’est pas une mince affaire.

L’élan du monde
10 min ⋅ 06/05/2025

N’avons-nous pas le goût du travail bien fait, un travail qui soit bon pour nous, pour les autres, pour ce monde, pour cette vie ?

Ne sommes-nous pas porteuses et porteurs d’émancipation par notre travail, que celui-ci soit reconnu comme tel ou non ?

Ne sommes-nous pas toutes et tous des personnes créatives, productrices de valeur ?

Ne sommes-nous pas toutes et tous des personnes actives et perceptives ?


Nous aimons nous activer et nous aimons aussi nous reposer, percevoir, contempler. Nous aimons recevoir

la fraîcheur humide, respirer l’air parfumé du printemps. On se surprend à chantonner « on est des foules sentimentales, avec soif d'idéal, attirées par les étoiles, les voiles, que des choses pas commerciales »1

Et cette douce participation au « grand tout vivant » n’altère en rien notre désir de participer, notre goût du flow2, cette expérience où nous nous impliquons tellement dans ce qu’on fait, parce que ça nous plait, parce que ça nous correspond profondément qu’on en déborde de joie. Une joie créative.


Le récit selon lequel nous serions fondamentalement attirés, non par le travail - ou les étoiles - mais par les loisirs n’est, selon un professeur émérite d’économie3, rien d’autre qu’une de ces âneries qu’on enseigne dans les études … d’économie.


Notre époque aime nous identifier au manque. Manque de travail, d’argent, de consommation, de sécurité, d’organisation, d’ordre, de loisirs, de pouvoir d’achat… nous serions ces êtres de besoin et ces besoins se devraient d’être pris en charge par d’autres que nous, des individus qui seraient dotés de compétences supérieures, capables de nous gouverner, nous instruire, nous dire quoi faire, comment le faire et pourquoi le faire, des êtres qu’il nous faudrait écouter, à qui nous devrions donc obéir, devant qui nous devrions nous soumettre et si possible témoigner de notre reconnaissance.


Est-ce que nos véritables besoins ne se situeraient pas plutôt dans la recherche et l’échange de nourritures terrestres et affectives ? Dans le fait de sentir la possibilité d’une confiance collective - en apprenant à différencier les faits de leurs distorsions mensongères ? Et dans le fait de se reconnaître mutuellement actifs, qualifiés et créatifs dans cette recherche et cet échange ? De s’y déployer ?


Dans trois entretiens stimulants4, notre cousine Judith Bernard invitait le cousin Bernard Friot à expliciter un  projet de société qui nous pose toutes et tous en producteurs de valeur, en personnes créatives plutôt qu’en sujet de besoins.

« La bourgeoisie, dit Bernard, est toujours prête à nous filer du pouvoir d’achat. Y compris sous forme de revenu de base : elle nous méprise suffisamment pour cela. Mais elle refuse totalement (parce que, là, c’est son pouvoir qui est en jeu) que nous soyons des producteurs, reconnus comme tels. Parce que si nous sommes reconnus comme producteurs, alors nous sommes légitimes pour revendiquer la souveraineté sur la production ».


Quand Bernard part sur cette voie, en général, il argumente beaucoup, en convoquant de nombreuses informations mais, pour cette lettre, j’avais envie de synthétiser, de rester concentré sur ce fait précis : nous produisons, chacune, chacun à notre façon, quelque soit notre métier ou absence de métier, jeunes ou vieux, valides ou invalides, rangés dans la catégorie des actifs ou des inactifs, nous produisons. Nous produisons, par notre présence singulière, perceptive et active, et par nos échanges. Nous créons des biens matériels et immatériels .

Et même si nous sommes biberonnés (même imbibés jusqu’au cou) à notre jolie culture de compétition, d’exploitation et de consommation, une des choses primordiales qui nous rendent vivants et dont nous avons besoin pour trouver du sens à cette existence, c’est agir et contempler, faire et ne rien faire, percevoir et créer, trouver une harmonie, un équilibre entre ces deux pôles.


Oh, comme votre espace inconnu est attirant ! Aquarelle sur papier, 29/42 cm, Détail, Avril 2025

 

Avec cette affirmation selon laquelle nous sommes les véritables producteurs qu’il s’agit de faire reconnaître, on dirait bien que Judith et Bernard nous désignent une sorte de clé de voûte, cette pierre sur laquelle reposent de véritables édifices - notamment les cathédrales, qui, vous en conviendrez, ne sont pas  des petites bicoques de rien du tout.


Et si la confusion, si l’abattement caractérisés de notre époque provenait d’une défaillance au niveau de la clé de voûte de notre temple civilisationnel ?

Que diriez-vous de tenter une petite expérience ? 

Si on retirait la pierre qui nous identifie à de gros fainéants irresponsables ou des paresseuses qui, dès qu’on les prive de bâton et de carotte, passent leurs journées dans la neurasthénie la plus stérile ? Si on la remplaçait par la pierre de notre émancipation, de notre désir de nous déployer dans nos singularités et de notre plaisir à participer au bien commun à partir de nos libres singularités créatrices, en interaction ?


Il paraît que, si on retire cette pierre, tout part en binette. Ce qui était conçu pour durer mille ans se déglingue en deux temps trois mouvements. Soyons donc précautionneux, préparons soigneusement notre affaire, certains devront tirer sur la vieille clé défectueuse tandis que les autres glisseront la nouvelle avec douceur. Si c’est la bonne, on doit entendre un « ahhh ! » unanime de soulagement. Un peu comme si, d’un coup, on n’avait plus mal aux dents.


Soyons vigilants et synchronisés parce qu’à tenter ce type de chose, on risque de nous accuser de complotisme, d’ameneuses ou ameneurs de chaos et de multiples autres maux, tous plus repoussants les uns que les autres.

Imaginez : si, ouvrière sur une chaîne de production, vous prenez conscience - individuellement et au sein d’un réseau de collectifs - de votre légitimité pour faire part de votre expérience, de votre connaissance et de votre expertise sur  cette chaîne, sur son comment et son pourquoi, sur son impact sur les corps, les esprits, les sensibilités, la culture, la démocratie, l’économie et l’état général de notre planète, pardonnez-moi, mais vous risquez de provoquer un sacré désordre.

Et même une drôle de panique !

Sans délai, de nombreux individus, jusque-là considérés comme les seuls experts valables, vont probablement gesticuler dans tous les sens en faisant revenir à la mode la désuète mais néanmoins célèbre formule du « tout va à vau-l’eau » (que je replace avec un plaisir malicieux dès que l’occasion se présente). Et je peux vous garantir que s’ils braieront de la sorte, ce ne sera pas véritablement dans le cadre poétique d’une performance chorégraphique d’art contemporain.


Votre situation est différente ? Vous n’êtes pas ouvrière ? L’expert qualité c’est vous ? Vous êtes DRH ? Et la culture d’entreprise qu’on vous a toujours enseignée encourage l’autonomie et le point de vue de chaque individu,  dites-vous ? Vraiment ?

Bien. Supposons donc que vous êtes employé dans un bureau, un commerce, une caserne, un hôpital, une armée, une école, un restaurant, une entreprise de bétonnage, un EPAHD (ou je ne sais quel autre organisation bien connue pour ses effets épanouissants) et que vous commencez, isolément, l’air de rien, puis par petits groupes disséminés qui finissent irrésistiblement par se relier, à réaliser que les productrices et les producteurs, c’est vous ; que vous êtes qualifiés, que ça vous donne un pouvoir et une responsabilité, que cette responsabilité vous oblige même à assumer la  réflexion, l’observation, l’élaboration et la modification concrète de la façon dont vous travaillez et de ce que vous produisez, vous éprouverez certainement le formidable enthousiasme qui vient de la capacité à prendre sa vie en main, vous n’aurez certainement pas du tout envie de lâcher la possibilité de participer activement et intelligemment au bien commun, vous retrouverez peut-être même ce que vous étiez venus chercher dans ce foutu métier qui vous a tellement peiné jusque-là, qui vous avait précisément coincé quelque part entre cette neurasthénie  et cette compensation dans le loisir préfabriqué qu’on vient d’évoquer, vous témoignerez d’une joie indicible à, chaque jour, mieux réintégrer votre dignité, à vous sentir agissant dans une dynamique chargée de sens… d’accord, d’accord, tout cela est formidable.

Mais reconnaissez que vous allez mettre une véritable pagaille !


Avez-vous pensé à tous vos supérieurs et/ou employeurs ? Avez-vous pris en compte ce qu’ils éprouveront s’ils constatent qu’ils ont bien des compétences mais que les vôtres les valent peut-être ? Si, par la réintégration de votre autonomie créatrice, vous les amenez (pas tout seul ou toute seule mais collectivement, au nom d’un consensus) à prendre conscience que vous pouvez  bien-sûr faire des erreurs, mais qu’eux-aussi font de singulières bourdes ? Et qu’à bien y regarder, ce serait une bonne idée de se tourner radicalement vers un mode de production un peu plus éthique et des objectifs plus vertueux ?

Avez-vous seulement songé aux surprenants écarts de salaires qui deviendront pour eux de plus en plus délicats à justifier dans le nouveau contexte, que dis-je, le nouveau paradigme que vous apportez avec tant de légèreté ?

Avez-vous pris en compte le désappointement des actionnaires à qui vous ne laissez aucune chance de justifier leurs revenus, vu leur absence totale de travail ?

Pour rappel, en 2024, les entreprises du CAC 40 ont versé 98,2 milliards d’euros à leurs actionnaires, soit une hausse de plus de 40% en trois ans. Sans en ramer une. Dans le même temps, le pouvoir d’achat des travailleuses et des travailleurs a quant à lui diminué de près de 4% entre 2021 et 2024. Je dis ça en passant, je n’insiste pas.5

Et les fabricants d’évasion fiscale, avec leurs 200 milliards d’euros annuels, majoritairement occasionnés par les ultras riches et les grandes multinationales à travers la fraude et l’optimisation, les avez-vous seulement pris en compte6

Si vous leur dites «  ça suffit de fabriquer de l’aliénation, de bousiller la seule planète qu’on a pour que quelques malades puissent jouer avec leurs jets privés. Nous sommes majeurs et qualifiés pour faire du bon boulot, quelque chose qui ait du sens, et c’est ce qu’on va faire dorénavant », si vous vous affirmez ainsi, reconnaissez-vous dans quelle situation vous piégez toutes ces chics filles et tous ces chics garçons - qui ont bien le droit d’aimer jouer au jet ?


Et même si ça nous donnerait des chances de trouver la robustesse dont nous avons besoin pour nos démocraties, nos existences et celle des autres terrestres, on ne peut décemment pas leur faire ça.

Ce serait trop dur pour eux.


Hmmm… vous ne semblez pas convaincus.

Je vous vois venir : « et eux, ne témoignent-ils pas d’une violence destructrice et d’un mépris inouïs ? Ne sont-ils pas les semeurs de chaos auxquels on voudrait nous identifier ? »

J’en entends même expliquer qu’en réaffirmant notre qualité de productrices et producteurs de valeur nous pourrions les extirper de leur existence hors sol, leur paranoïa et leur perversité pathologique. Les aider en somme.


Bon. J’écoute vos arguments.

Comme disent les communicants : « j’entends ».

Je ne reste pas sourd à vos propositions.

Si un célèbre général n’avait déjà mis le grappin sur la formule, j’oserais même : « je vous ai compris ».


Alors, c’est d’accord. Mais c’est vraiment parce que vous insistez : dès tout de suite, on prend pleinement notre place de productrices et producteurs de valeurs.

Attention, pas dans l’isolement ! Il s’agit de contaminer joyeusement autrui par notre pensée subversive, notre audace et notre persistance, il s’agit de tisser et d’entre-tisser encore. On ne peut pas y aller à l’aveuglette ou à la one man show. On ne provoquerait qu’un spectacle inoffensif de plus et, on l’a vu, le capitalisme, ayant besoin de « loisirs »pour mieux asservir, adore les spectacles. Il nous faut inviter à reconnaître notre qualification, notre expérience. Il nous faut relier cette prise de conscience à ce que nos grands-tontons et grands-tatas nous ont légués en 45-46, comme fruits de décennies de travail. Nous appuyer sur leur extraordinaire apport.


Et là, je suis tenu à revenir auprès de Bernard qui m’a ré-éclairé(dans une causerie récente) et Julie (dans cet entretien cité plus haut) au sujet de ces acquis, ces conquis du XXème siècle.

Écoutons-les :

BF : « (…) souvent 1945 est présenté comme une espèce de produit des circonstances : le capital est aux abois parce qu’il avait collaboré, la Russie faisait une pression internationale suffisante pour que la classe dirigeante d’Europe de l’Ouest fasse le gros dos, les résistants étaient armés, etc.

JB : Ce sont quand même des faits, c’est vrai aussi. Il n’y a pas que ça, mais ce sont des faits indiscutables.

BF : (…) les difficultés considérables n’ont pu être surmontées que parce qu’il y avait une organisation et une autonomie ouvrière construite depuis belle lurette (…).

Même avec toutes ces circonstances favorables, rien n’aurait été possible sans ce préalable qu’a été la constitution de la CGT (…) ayant déjà plus de 50 ans d’expérience. »

Judith précise : « (…) la révolution à laquelle vous nous invitez à nouveau, il ne s’agit que de la poursuivre. Elle a déjà commencé : elle commence par ce que vous appelez 1945, dans les institutions dont la classe ouvrière s’est dotée, et dont elle a doté la société, à travers la sécurité sociale, le statut de la fonction publique… »

«  (…) Ce n’est pas juste une manière de réparer les dégâts du capitalisme, et de faire en sorte d’aider les démunis, ceux à qui le capitalisme ne profite pas… C’est une manière de reconnaître qu’il y a une autre valeur, il y a une autre production de valeur que dans les entreprises capitalistes, et la cotisation reconnaît et rémunère cette valeur là. »

« (…) Vous qualifiez le salariat de « classe révolutionnaire », vous montrez que les luttes du salariat au XXe siècle permettent d’obtenir des institutions subversives du capitalisme (…) notamment dans la manière de penser et de définir un certain nombre de droits qui sont ouverts. Je pense par exemple aux allocations familiales qui sont calculées comme du salaire : c’est 225 h payées au salaire horaire d’un ouvrier spécialisé de la métallurgie - c’est pensé et calculé comme du travail ! C’est hyper important cette manière de reconnaître que l’allocation qu’on donne aux parents, ce n’est pas en fonction des besoins supposés des enfants, c’est qu’on reconnaît que les parents produisent de la valeur, que c’est du travail, donc on calcule ça à partir du taux horaire d’un ouvrier.4 »


Nous produisons de la valeur. Ce n’est pas mon emploi qui crée de la valeur, c’est ce que je fais et ce dont je suis porteur. Dans et hors de mon éventuel emploi.

Il faut nous organiser dans cette présence à nous-mêmes. Individuellement, collectivement. Dans le mouvement de nos vies, sentir et affirmer notre puissance effective et potentielle, la grande vie, le grand flux : toutes et tous, quelque soit notre situation, nous sommes des créateurs, nous apportons de la valeur !


 Oui, oui, là à cet endroit du grand espace ! Aquarelle sur papier, 29/42 cm, Détail, Avril 2025


Récemment, Philippe, lecteur de Fakir, demandait « quand est-ce que l’on va admettre que les salariés (surtout de la base) sont des gens responsables, avec une volonté que les choses marchent bien et que le travail fourni soit bien fait ? Quand est-ce que les patrons vont les écouter ? ». Ça tombe sous l’évidence. Faire en sorte que le travail soit bien fait est dans l’intérêt des employeurs. Et qui de mieux placés que les travailleurs pour dire comment faire ? Alors pourquoi ce refus constant ?

Probablement parce que la motivation inavouable du patronat, dans sa grande majorité, n’est pas véritablement le travail bien fait. La valeur « travail » revendiquée par les partis politiques de Droite n’est qu’un éternel tour de passe-passe. Ce n’est même pas l’argent en lui-même. « L’obsession d’une classe dirigeante, nous explique Bernard, ce n’est pas l’argent, c’est la souveraineté sur la production. Tant que c’est elle qui décide de qui travaille, sur quoi, où, pour quoi faire, elle a le pouvoir ».

Autrement dit, les dirigeants dirigent, non pour l’argent seul, mais pour la puissance. Et l’image que ça donne. L’identité que ça procure. Ce gigantesque asservissement, cet énorme assujettissement mondial, uniquement pour une question d’identité qui, à bien des égards, n’est qu’une histoire de regards individuels et collectifs, de récits, de fictions. Toute cette domination et cette prédation sans fin uniquement par une inconscience abyssale, une indigence affective et une absence sidérante de questionnement sur soi, une absence à la vie !


On peut donc supposer que les salariés seront écoutés quand ils rejetteront cette mise en scène avec, d’une part des sujets de besoin - les salariés et les chômeurs - et d’autre part leurs saints bienfaiteurs, les « créateurs d’emploi ». En réalité nous avons toutes et tous besoin les uns des autres. 

Quitter cette affabulation nous offre quelques chances de tenir compte de l’expérience et l’expertise des uns et des autres quand nous ne serons plus des employés, ni des employeurs, ni des auto-entrepreneurs et que nous nous reconnaîtrons toutes et tous, comme des créateurs de biens, de services et de valeurs, interdépendants. Nos gouvernants affectionnent le statut d’auto-entrepreneur parce qu’il cultive le mythe de l’indépendance.


Quitter l’affabulation n’arrivera certainement pas tout seul. Nous avons besoin d’une culture vive et créatrice qui ose l’engagement politique. Précisément, nous avons besoin que la Gauche prenne à bras le corps la question centrale de notre légitimité à décider de ce qu’on fait dans le travail et de notre capacité à différencier le travail qui sape la confiance en la vie, pollue les terres et les rivières, altère les sensibilités, le travail qui aliène, du travail qui œuvre au bien commun, du travail qui émancipe, du travail qui œuvre à prendre soin de la santé partagée, celle des humains et celle de la riche biodiversité. Cette diversité qui lui permet, encore, de vivre.


 Et si on s’écoutait ? Et si on écoutait ? Aquarelle sur papier, 29/42 cm, Détail, Avril 2025


J’ai pris l’habitude de terminer cette lettre par un poème récent. Celui qui arrive évoque deux artistes qui me sont chers, Henri Matisse et Joseph Beuys. Si le premier est, je suppose, connu de tous, le second l’est un peu moins. Henri souhaitait que sa peinture puisse offrir l’effet d’un bon fauteuil. De son côté Joseph, initiateur de la sculpture sociale, considérait que tout est art et que nous sommes toutes et tous des artistes, porteurs de créativité. Dans ce sens, on pourrait dire qu’il voulait nous faire sortir de notre fauteuil et de son trop grand confort.

Au-delà de cette opposition apparente, les deux changèrent l’art.

Et les deux nous offrent, encore aujourd’hui, un vaste élan de liberté.


*



Ce matin, bu un café dans une tasse jaune

sur une soucoupe entre le rose et le mauve.


Avec le soleil de bientôt mai

on s’approchait de la perfection.


Matisse n’est pas d’un côté

et Beuys de l’autre.


Il n’y a que des révolutionnaires.



*




Sources :


J’ai assisté il y a quelques semaines à une conférence de Bernard Friot, suivie d’un atelier et de plusieurs temps de questions réponses. Le tout organisé par des femmes et des hommes qui produisent un travail remarquable au sein d’un collectif de soutien au programme du NFP.

Je les remercie chaleureusement.

Le livre d’entretien avec Judith Bernard m’a particulièrement intéressé, ainsi que quelques films (d’entretiens également) qu’on peut facilement visionner sur l’internet.

Cette lettre de mai est donc née de la rencontre entre différentes énergies militantes, individuelles et collectives, des questionnements, des analyses politiques, des rappels historiques, des pensées vives, des cheminements et la lecture-écoute que j’en ai faite. Le tout nécessairement entrelacé à ma propre subjectivité et à sa tendance à baguenauder.

J’espère n’avoir trahi ni la recherche singulière de Bernard ni la riche perspicacité de Judith.

Ces deux Bernard m’ont épaté et je les remercie profondément. 


Foule sentimentale, chanson écrite, composée et interprétée par Alain Souchon, est extraite de l'album C’est déjà ça, sorti en 1993.

2 Le concept de flow, particulièrement présent dans le bouddhisme et le taoïsme, a été développé sous ce terme par le psychologue Mihály Csíkszentmihályi. Je dirais qu’il s’agit de ce sentiment d’être porté par ce qu’on est en train de faire. Le flow a trouvé son nom en 1975, lorsque Csíkszentmihályi a interviewé plusieurs personnes qui décrivaient leur expérience en expliquant qu'ils avaient la sensation d’être portés par le courant dans une rivière.

3 Il s’agit de Bernard Friot, sociologue et économiste

   https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/l-invite-e-des-matins/et-pourquoi-pas-la-retraite-a-50-ans-1047900

4 Bernard Friot & Judith Bernard, Un désir de communisme, Conversations pour demain, Éditions Textuel 

5 https://www.humanite.fr/social-et-economie/cac-40/inegalites-chomage-rechauffement-climatique-ce-que-nous-coutent-les-exorbitants-dividendes-des-actionnaires

   https://analyses-propositions.cgt.fr/memo-eco-des-versements-de-dividendes-records-pour-les-actionnaires-du-cac-40-en-2024

6 Dossier lignes d’attac #140, janvier 2025

L’élan du monde

Par Olivier Belot

Après avoir étudié aux Beaux-arts de Nancy, j’ai exposé en France, en Allemagne, en Pologne, au Luxembourg et aux États-Unis. Néanmoins, je crois être un artiste discret, qui comme beaucoup de plasticiens, use de l’art comme d’un objet transitionnel permettant de partager ponctuellement ce qui s’élabore longuement dans un certain retrait du monde. En complémentarité avec cette relative solitude, je développe avec d’autres personnes - souvent militantes et créatrices - des dispositifs de rencontre et de recherche collective autour des nécessaires transitions ou mutations écologiques et solidaires. Le Café Itinérant de la Transition, créé au sein de son collectif, dans le département de la Meuse en est une manifestation. Enfin, j’anime avec Béatrice Belot Le Deley le singulier Atelier des Prés qui ouvre chacun.e à l’expression créatrice. Cet atelier est situé dans le village de Pareid en Meuse. Écrivant autant que je dessine, le format de la lettre me permet de donner plus régulièrement des aperçus de mon travail. Instagram : _olivierbelot_

Instagram de l’Atelier des Prés : latelierdespres

Blog : https://olivierbelot.jimdofree.com/

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